Environnement
Valorisation
Moins de plastiques jetables et une responsabilité renforcée des producteurs de déchets : c’est l’esprit de la loi AGEC (contre le gaspillage et pour une économie circulaire). Voté en 2020, ce texte de 130 articles continue de faire débat. Mais les professionnels doivent anticiper sans attendre son entrée en application. Décryptage.

Particulièrement débattue et amendée, la loi anti-gaspillage (dite AGEC) aura un impact sur l’ensemble de la société. Elle compte accélérer le changement de modèle de production et de consommation. Objectifs : limiter les déchets et préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat.

Elle s’articule autour de 5 grands axes :

  • sortir du plastique jetable ;
  • mieux informer les consommateurs ;
  • lutter contre le gaspillage et pour le réemploi solidaire ;
  • agir contre l’obsolescence programmée ;
  • mieux produire.

Tout un pan de notre économie est bouleversé par cette loi : elle encourage la transition vers un modèle économique solidaire, durable et responsable.

Une loi pour redonner vie aux déchets

Les déchets s’inscrivent au cœur de la loi. Son ambition : en générer de moins en moins mais aussi mieux les transformer en vue du réemploi des matières premières.

Des premières mesures concrètes sont déjà entrées en vigueur le 1er janvier 2021. Tour d’horizon de ces nouvelles obligations :

FIN PROGRESSIVE DE TOUS LES EMBALLAGES PLASTIQUES À USAGE UNIQUE D’ICI 2040

Tous les produits en plastique à usage unique sont désormais interdits en France. De leur côté, les entreprises et les collectivités ne peuvent plus distribuer de bouteilles en plastique.

Progressivement, les emballages et les objets en plastique jetables vont disparaître avec une élimination complète d’ici 2040. D’ici là, 2025 marquera le passage au plastique 100 % recyclable et recyclé.

RÉDUCTION DE LA MISE EN DÉCHARGE ET RENFORCEMENT DU SUIVI DES INSTALLATIONS DE TRAITEMENT

Le texte impose aux producteurs ou détenteurs de déchets non dangereux de justifier que leurs obligations de tri ont bien été respectées en amont. Sinon, l’élimination de ces déchets ne pourra pas se faire dans les installations de stockage et d’incinération, qui font figure d’ultime recours.

Pour un contrôle encore plus strict, la mise en décharge des déchets non dangereux et non inertes dans une installation de stockage ou d’incinération se fait à présent sous l’œil d’une caméra.

SOUTIEN AU DÉVELOPPEMENT DES COMBUSTIBLES SOLIDES DE RÉCUPÉRATION

Si la valorisation matière n’est pas possible, la loi AGEC prévoit que 70 % des déchets concernés soient traités par incinération. À la clé : une valorisation énergétique utile aux industries et collectivités.

Objectif : renforcer le développement de la filière des combustibles solides de récupération (CSR), fortement soutenue par les industriels du traitement et du recyclage des déchets (notamment pour la gestion des refus de tri).

RENFORCEMENT DES OBLIGATIONS LIÉES AU TRI À LA SOURCE DES BIODÉCHETS

Épluchures de légumes, restes alimentaires, feuilles mortes… tous les déchets organiques issus de matières naturelles (animales ou végétales) sont encadrés par la loi Grenelle 2 de 2010. D’ici 2023, la loi anti-gaspi mettra l’accent sur le tri à la source de ces biodéchets.

DÉPLOIEMENT D’UN INDICE DE RÉPARABILITÉ

Désormais, les vendeurs d’équipements électriques et électroniques doivent afficher un indice de réparabilité sur leurs produits. Cette notation (de 0 à 10) doit être apposée directement sur le matériel ou son emballage. Un scoring utile pour le consommateur : il l’informe de manière très claire sur le niveau de difficulté pour réparer ou faire réparer son produit en cas de panne.

Actuellement, 5 catégories de produits sont en phase « pilotes » :

  • lave-linge ;
  • téléviseurs ;
  • smartphones ;
  • ordinateurs portables ;
  • tondeuses à gazon.

Objectif : 60 % de taux de réparation des produits électriques et électroniques d’ici 5 ans.

GÉNÉRALISATION DU TRI DES DÉCHETS, Y COMPRIS DANS L’ESPACE PUBLIC

Le tri des déchets à la source concerne tout le monde : professionnels, collectivités et donc par ricochet les particuliers !

FOCUS SUR… le secteur du BTP et les ERP

1. Le secteur du bâtiment et des TP génère à lui seul plus de 42 millions de tonnes de déchets par an. Un chiffre considérable et regardé à la loupe, d’autant qu’une partie de ces déchets finit sa course dans des décharges sauvages… La loi AGEC s’attaque à ce fléau écologique et économique avec :

  • Le renforcement de la traçabilité, de la collecte et de la valorisation des déchets du bâtiment ;
  • La lutte active contre les dépôts sauvages ;
  • La création du statut « déchet des matériaux, équipements ou produits de chantiers de réhabilitation ou de démolition » pour augmenter leur réemploi.

2. Pour les établissements recevant du public (ERP), un système de collecte des déchets doit être obligatoirement mis en place pour réaliser un tri à la source. C’est particulièrement le cas des 5 flux (papier, métal, plastique, verre et bois) et des biodéchets.

RENFORCEMENT DE LA TRAÇABILITÉ DES EXPORTS DES DÉCHETS

Les déchets qui passent par un éco-organisme deviennent encore plus scrutés. En tant qu’intermédiaires de collecte, ils sont désormais tenus « d’assurer une traçabilité des déchets dont ils ont assuré, soutenu ou fait assurer la collecte dans l’exercice de la responsabilité élargie du producteur, jusqu’au traitement final de ces déchets ». Une mesure de transparence pour contrôler rigoureusement la destination finale des déchets collectés.

REP : QUE PRÉVOIT LA LOI EN CAS DE NON-RESPECT DES PROCÉDURES ?

« En cas de non-respect des règles fixées par la loi, le contrevenant reçoit un courrier du ministère chargé de l’environnement l’informant des sanctions auxquelles il s’expose. Il dispose d’un délai d’un mois pour y répondre et apporter ses observations. Après cette procédure, le ministère peut décider d’une amende administrative selon la gravité des manquements. Son montant peut aller jusqu’à 1 500 € par unité ou par tonne de produits concernés (pour les personnes physiques) et 7 500 € pour une personne morale. »

Mouna Messai, Consultante RSE, Hubency